"A lot of effort goes into drawing things effortlessly"

dimanche 8 mars 2015

Projet fashion


"Pourquoi Projet Fashion n'arrivera pas à la cheville de Top Chef"




Mais aussi, "Pourquoi Top Chef ça pourrait être vachement mieux"...


La semaine dernière j’ai regardé l’émission Projet Fashion parce que je voulais en discuter avec vous et parce que j’ai un a priori positif sur ce genre concours, quand ils sont bien fichus comme Top-chef, effectivement (cf. l'article d’Alicia BIRR, pour Slate, lien ci-dessus) et comme Nouvelle star, aussi, qui me plonge à chaque fois dans d’interminables considérations philosophiques autour de ce qui relève de l’acquis ou de l’inné (le talent, le don… les deux ?)…


Il est évident que ce qui fait l’intérêt d’une émission comme Top Chef, c’est la très grande qualité de l’encadrement professionnel -et de la créativité qu’inspirent les règles du concours d’une manière générale. En tant qu’artiste professionnel et enseignant à de jeunes talents (vous...), cela me parle bien. Pour ces deux émissions, la qualité ainsi (et surtout) que les nombreux parrainages reconnus du monde de la gastronomie et du show-business leur ont donné une sorte de crédibilité artistique. Et puis les candidats (particulièrement de TopChef) n'ont pas l'impression de se griller dans le milieu en participant à un concours télévisé. Enfin, avouons-le, le concept fonctionne plutôt bien à la télé, qui n’est qu’un média de masse parmi d’autres.

Quoi qu’il en soit, comme l’auteure de l’article de Slate, j’ai été plutôt déçu par Projet Fashion -voire même un peu gêné, au début. Déjà, effectivement, le thème était trop facile, trop prévisible, trop cheap. 

Tout de même, un candidat a assuré malgré tous les mauvais choix de la prod’ : j’ai été soufflé par la robe en dentelle de silicone de Matias. Les conditions du concours étaient un peu pushy et stressantes (D8 oblige), mais c’était LA bonne idée, j’ai adoré, tout, le rendu, la texture, le tombant et l’élasticité du vêtement sur le modèle qui défilait, c’était élégant, aérien, cheap et chic (et tel quel, presque importable aussi ;)


En voilà enfin un qui a eu une entrée « matière » plutôt que « modèle » dans son projet et il me semble que c’est exactement ce qu’il faut faire dans ce genre de concours, je n’arrête pas de le crier aux mecs quand je regarde Top chef : « arrêtez de penser « recette » ; pensez « produit », merde ! » Dans Projet fashion, la plupart se sont dit « Je vais faire un modèle en utilisant (whatever : des bouts de tableaux, une bâche plastique, du raffia…) » et il y en a un qui s’est dit « je vais faire de la dentelle avec un pistolet à silicone »… Voilà, à la limite, je me fiche du modèle, ce peut être une robe, un accessoire, un napperon… c’est la matière (et ici, en plus, l’idée géniale) qui importe ; ensuite, il suffit de coller à la consigne : « Vous voulez une robe de cocktail? Ok, faisons une robe de cocktail en dentelle de silicone! »… (Enfin, je dis « il suffit de coller à la consigne »… encore faut-il maîtriser les fondamentaux de la couture et des volumes et avoir le temps de bien le faire...)
C’est la même chose dans Top chef, on demande aux cuisiniers de faire des plats de haute gastronomie à base de... pain, ou de pâtes, et les mecs se disent « tiens, je vais faire une variation autour du pain perdu »… ou encore « tiens, un gâteau de pâte », ou « des sashimis ! », ou « une soupe de pain »… Rares sont ceux qui ont une « approche produit » et qui se demandent DE PRIME ABORD comment inventer un truc nouveau (ou bizarre, à la limite) simplement à partir du produit de la consigne… Pourtant, une fois qu’on a fait ses chips de cannellonis soufflés, par exemple (c'était l'idée géniale de Linguini -pardon, de Martin...), soit un produit nouveau et original, il sera toujours temps de se demander comment accompagner le produit… Les candidats sont tous des cuisiniers confirmés, cela ne devrait pas poser trop de problèmes (sauf craquage, bien entendu... D'ailleurs le Martin de TopChef ne devait pas avoir son petit rat sous sa toque parce qu'il a gâché son idée et personne dans le jury ne les as remarqués, ses cannellonis soufflés…).


 Ce qui est super difficile à trouver, à mon avis dans un tel concours, c’est l’idée géniale (et immédiate, surtout), parce que si on est un bon cuisinier ou un bon couturier, qu’on maîtrise ses saveurs, ses textures, ses techniques et ses assaisonnements, c’est la conclusion ET l’idée géniale sur un ou deux produits qui fera le plat d’exception, plutôt que l’excellente réalisation de la recette qui, seule, fera plutôt un grand plat (ce qui est déjà très bien, certes, mais qui ne fait pas des victoires inoubliables).


Peut-être que la télévision mainstream pourra proposer de la télé de qualité sur la mode lorsque la majorité des gens saura « autant différencier la soie, le crêpe de Chine, la charmeuse et la georgette qu'une aubergine et un topinambourg »… Dixit Mme Birr.
Autrement dit, avoir une vraie approche « matière » haut de gamme, selon moi.


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